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La France visionnaire est-elle en train de renoncer à protéger le vivant ?

Réflexion sur le retour des néonicotinoïdes et la nécessité d’un autre modèle agricole

En 2018, la France avait fait un pari ambitieux : interdire les néonicotinoïdes, ces insecticides systémiques notoirement dangereux pour les abeilles et les pollinisateurs. Elle se posait en pionnière européenne, affirmant qu’un autre modèle agricole était possible : productif, mais respectueux de la biodiversité.

Au lendemain du vote définitif de la Proposition de loi visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur (la « PPL Duplomb »), il est urgent de regarder la réalité en face : sous couvert de « simplification » et de « soutien aux agriculteurs », la France s’autorise désormais à rouvrir la porte à des substances bannies, dont certains néonicotinoïdes interdits pour protéger les pollinisateurs et les écosystèmes.

Ce choix signe un véritable recul. Où est passée la France visionnaire, celle qui voulait être un exemple d’agriculture durable et respectueuse du vivant ?

Les abeilles sont des alliées indispensables pour la pollinisation et la production alimentaire.

Un problème structurel maquillé en « urgence »

La justification officielle ? Une grave épidémie de jaunisse virale, transmise par des pucerons, a frappé les champs de betteraves. Sans protection chimique, les rendements s’effondraient, menaçant la survie économique de certains producteurs.

Le gouvernement a donc cédé à la pression de la filière sucrière et au spectre d’une « concurrence déloyale » avec des pays voisins encore autorisés à utiliser ces produits.

Mais derrière cette décision « pragmatique » se cache un problème bien plus profond : un modèle agricole hyper-spécialisé et dépendant des intrants chimiques.


✅ Des variétés sélectionnées uniquement pour le rendement, pas pour la résistance.
✅ Des monocultures sur des milliers d’hectares qui favorisent les épidémies.
✅ Des systèmes agricoles incapables de gérer les crises sanitaires sans chimie lourde.

Réflexion sur le retour des néonicotinoïdes et la nécessité d’un autre modèle agricole

Les néonicotinoïdes ne sont pas des insecticides banals. Ils sont systémiques : la plante entière devient toxique pour les insectes.

Leurs impacts sont massifs et bien documentés :

✅ Mortalité accrue des abeilles domestiques et sauvages.
✅ Déclin des papillons, coccinelles et autres auxiliaires naturels.
✅ Pollution durable des sols et des eaux.
✅ Effets en cascade sur les oiseaux insectivores et les écosystèmes entiers.

En réautorisant ces molécules, même temporairement, la France fragilise encore davantage une biodiversité déjà menacée.

Les résidus de pesticides contaminent durablement les sols et les cours d’eau.

Des risques pour la santé humaine

✅ Les néonicotinoïdes persistent dans les sols et les eaux.
✅ Ils contaminent les nappes phréatiques, donc potentiellement l’eau potable.
✅ Les cultures suivantes sur ces mêmes sols peuvent être contaminées.

Sur le plan sanitaire, des études montrent :
⭐ Des effets neurotoxiques potentiels, préoccupants pour le développement cérébral des enfants exposés in utero.
⭐ Des soupçons de perturbations endocriniennes.
⭐ Des liens possibles avec certains cancers.
Des impacts sur la fertilité masculine : baisse du nombre et de la qualité des spermatozoïdes, anomalies morphologiques, atteintes de la spermatogenèse via stress oxydatif et déséquilibres hormonaux .En clair : nous parlons ici de molécules conçues pour tuer, persistantes et mobiles, dont l’usage massif laisse une empreinte durable et potentiellement toxique pour l’humain.

Les néonicotinoïdes peuvent contaminer les eaux souterraines et les réseaux d’eau potable.

Les agriculteurs pris dans un système qui les fragilise

Le plus paradoxal ? Ces dérogations sont présentées comme une « protection » des agriculteurs, alors qu’elles ne font qu’accentuer leur dépendance.

Obligation d’acheter des semences traitées et des intrants chimiques onéreux.
✅ Endettement croissant et soumission aux logiques de l’agro-industrie.
✅ Moins de marge de manœuvre face aux aléas climatiques et sanitaires.

Au lieu de valoriser la qualité, la résilience et la préservation des sols, on subventionne un modèle productiviste à courte vue, qui laisse aux producteurs la charge des coûts sociaux, économiques et environnementaux.

Une précarité agricole trop souvent passée sous silence

Derrière ces choix politiques se cache une réalité ignorée dans ces débats : la précarité grandissante de nombreux agriculteurs.

Des prix d’achat écrasés par la grande distribution et l’industrie agroalimentaire, toujours plus exigeantes sur les prix au détriment d’une rémunération décente.
✅ Une dépendance entretenue aux intrants chimiques et aux semences propriétaires, qui rongent les marges et aggravent l’endettement.
✅ Un manque de soutien réel pour engager la transition vers des pratiques plus durables et autonomes.
✅ Trop peu de circuits courts et de débouchés locaux permettant de rapprocher producteurs et consommateurs, et de garantir un prix juste.
✅ Une pression mentale énorme, entre incertitudes climatiques, contraintes économiques et injonctions contradictoires.

Réautoriser ces pesticides n’est qu’un pansement chimique sur une plaie béante : cela ne résout rien des causes structurelles de cette vulnérabilité. Plutôt que d’encourager l’autonomie, la santé et la qualité des productions, on perpétue un système qui épuise la terre… et ceux qui la cultivent.

En France, un agriculteur se suicide en moyenne tous les deux jours. Le taux de suicide y est 20 à 28 % plus élevé que la moyenne nationale, avec un risque encore accru chez les 45–64 ans, notamment dans les filières bovines.

Ce drame résulte d’une combinaison de précarité financière, d’endettement, de pression des prix imposés par la grande distribution, d’isolement social et du stress lié aux aléas climatiques et réglementaires.

Cette réalité souligne l’urgence de repenser notre modèle agricole : pour protéger la biodiversité, il faut d’abord protéger ceux qui cultivent la terre.

Où est passée la France visionnaire ?

La France qui avait interdit ces substances voulait montrer la voie. Elle portait un message : on peut produire autrement, en respectant la vie.

Cette décision de revenir en arrière est un aveu d’échec :

  • Peur d’investir massivement dans la recherche de solutions alternatives.
  • Peur de changer un système agro-industriel qui écrase producteurs et consommateurs.
  • Peur de remettre en cause une logique de volumes bon marché au détriment du vivant.

Ce n’est pas en nivelant par le bas qu’on sera compétitifs : c’est en redevenant exemplaires

L’alternative : l’ÉCO-CROISSANCE

Chez Passionplants.fr, nous refusons ce fatalisme.

Nous croyons qu’il existe un autre chemin :

✅ Valoriser les pratiques agroécologiques et rémunérer ceux qui les mettent en œuvre.

✅ Soutenir ceux qui produisent vraiment-nos agriculteurs.
✅ Investir dans la recherche et la sélection de variétés résistantes.
✅ Encourager la diversification des cultures et des paysages.
✅ Repenser nos modes de consommation pour moins de volume mais plus de qualité.
✅ Considérer la biodiversité comme un actif vital, non comme un coût à externaliser.

Nous appelons toutes celles et ceux qui partagent cette vision à s’engager : citoyens, producteurs, décideurs.

Parce que protéger la biodiversité, c’est protéger notre santé, notre alimentation et notre avenir commun.

Passionplants.fr : pour une culture du vivant et de la responsabilité partagée.

Sources et références :

• IPBES (2016) – Assessment of Pollinators  : https://www.ipbes.net/assessment-reports/pollinators

• EFSA (2018) – Neonicotinoids and Bees  : https://www.efsa.europa.eu/en/efsajournal/pub/5177

• https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0006320718313636

• Sanchez-Bayo & Wyckhuys (2019) – Worldwide decline of the entomofauna  : https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0048969715303843

• https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0048969715303843

• Morrissey et al. (2015) – Neonicotinoid contamination of global surface waters

• https://food.ec.europa.eu/plants/pesticides/approval-active-substances-safeners-and-synergists/renewal-approval/neonicotinoids_en

• European Commission (2017) – Neonicotinoids and bees – Factsheet

• Cimino et al. (2017) – Effects on human health  : https://ehp.niehs.nih.gov/doi/10.1289/EHP515

Endocrine disruptor pesticides  : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21776230/

• INSERM (2021) – Pesticides et santé  : https://www.inserm.fr/expertise-collective/pesticides-et-sante-nouvelles-donnees-2021/

• INRAE (2017) – Sortir des pesticides  : https://www.inrae.fr/actualites/agriculture-europeenne-pesticides-2050

• Transition agroécologique  : https://www.info.gouv.fr/actualite/la-transition-agroecologique-au-service-de-lagriculture-et-de-lalimentation-de-demain#:~:text=C’est%20l’accompagnement%20de,usines%20pour%20des%20start%2Dups.

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